J'ai été un enfant battu. AMA

C'est à vous !

Hello ! Je viens de voir que ceci avait été posté et aucune réponse n'a jamais été posté.

C'est compliqué de poser des questions sur ce genre de sujets car on a tous l'impression de bien le connaitre.

Par qui étais tu battu et pendant combien de temps ?

Bonjour Marimeltou,

Dans mon cas, j'ai été battu par mes 2 parents de manière plus ou moins récurrente.

Je vais d’abord commencer du moins pire au pire. Le moins pire dans mon cas, c’est ma mère. Elle a accouché de moi très jeune et sa vie jusqu’ici était très compliqué puisqu’elle s’est souvent sentie négligée par ses parents. Elle a notamment subi des attouchements de la part de son oncle et c’est quelque chose qui l’a profondément bouleversée dans le sens ou elle a développé un trouble. Elle ressentait ses sentiments de manière très, très forte et par conséquent, dès que je faisais une bétise même minime, j’avais le droit souvent à de la violence physique, comme psychologique par ailleurs.

Je me souviens d’une fois ou je m’étais pris une énorme trempe, car j’avais découpé mon cartable pour le rendre un peu plus joli. Et il tenait très bien, mais lorsqu’elle l’a vu, sa colère était telle que c’était impossible de la raisonner.

Malgré ça et d’autres menaces du genre «Si t’apprends pas ta leçon, je te tape» après une de mes bétises, elle restait malgré tout assez aimante et me soutenait souvent.

Mon père, à contrario, était un homme très négatif et très froid. Lui aussi a été battu dans son enfance, mais par ses 2 frères sur ordre de sa mère, et il était obligé de se cacher sous des voitures pour y échapper. Et à force, il a fini par développer un caractère très destructeur, au point ou il a du quitter son pays d’origine pour arriver en France, là ou il a rencontré ma mère. Son passé l’a mené, pour soulager la douleur, à se plonger dans les drogues dures et l’alcool. Mais il a l’alcool mauvais et son négatif s’est du coup décuplé au point ou il a maltraité ma mère et moi-même.

Le pire souvenir d’enfance reste lorsque je me suis fâché avec lui alors que je devais avoir 11 ans. Je me suis pris une trempe énorme au point ou j’avais énormément de douleurs dans le dos et lorsque j’y repense, je ressens mon dos qui se crispe et des souvenirs assez désagréables refont surface.

Comme sa mère avait recours à la violence et qu’il a été aussi éduqué comme ça, il ne connaissait pas forcément d’autres moyens d’éducation. Et c’est fort dommage car lorsqu’il était à jeun, c’était une personne qui était très réfléchie et qui pouvait faire preuve de gentillesse et de soutien. Je regrette qu’il a tourné ainsi car en parallèle de ça, je le tenais en haute estime pour ce qu’il était (à savoir un homme d’action qui n’avait peur de rien, fort, et qui était capable de faire des miracles avec ses mains).

Ouch, dur sujet auquel je ne souhaite à personne d'être confronté, en ayant expérimenté les contours...

Comment as-tu procédé pour te séparer au plus vite de ces personnes si proches au quotidien mais si violentes envers toi ? Et les esquiver le plus possible pendant ton enfance ?
As-tu pu trouver du soutien par ailleurs ?

Quelle est la conséquence de cette éducation dure sur ta perception de ta parentalité : présente ou future, ou au contraire sur ta volonté de ne pas devenir toi-même parent ? Et sur d'éventuels enfants de ton entourage ?

J'ai posé bcp de questions, j'en laisse aux autres, promis

Coucou

Déjà tout mon soutien. J'espère que tout ceci appartient définitivement au passé et que tu n'as plus à subir ça..

J'ai plusieurs questions auxquelles tu répondras certainement en répondant à Bob
Quelle relation as-tu aujourd'hui avec tes parents ? Leur parles-tu, les évites-tu ? Et le reste de ta famille ? Pouvez vous parler de ces violences ? Que ressens-tu vis-à-vis de tes parents ? Amour/haine/compassion/neutralité ?

Sans en dire trop pour garder ton anonymat, as-tu des frères et soeurs qui ont subi les mêmes violences que toi ?

Courage et félicitations pour oser en parler !

Bonsoir ! Pour commencer, c'est courageux de venir t'exprimer sur ce qui sont des traumatismes d'enfances. C'est toujours assez difficile de revenir sur des traumas sans que ça ne remonte tout une cascade d'émotions très dures à supporter et pour ça, bravo.

J'en profite aussi pour m'excuser de ne pas avoir vu le topic apparaître. Souvent, on le remarque et quelqu'un poste l'AMA dans le channel Organisation du Discord mais ça n'a pas été le cas donc excuse-nous pour cela.

Pour les questions, j'en ai quelques unes qui me viennent en tête :

• Qu'est-ce que ces violences ont laissé comme trace sur toi ? Au niveau psychologique, est-ce que tu en gardes des séquelles ?
  
• Est-ce que tu as pu voir un médecin ou un psychologue pour en parler et mieux vivre avec ce douloureux passé ?
  
• Question complémentaire à celles de Di'mort : pour avoir eu le passé de tes parents et une explication sur ces comportements violents : est-ce que tu leur en as parlé de tout ça ? Sais-tu ce qu'ils en pensent avec le recul ?
  
• Et aujourd'hui, comment vas-tu ? Est-ce que tu arrives à vivre malgré tout ça ?
  

Voilà, encore merci de venir prendre le temps de nous éclairer sur ce sujet, et j'espère que la réponse à ma dernière question sera positive. Personne ne mérite de subir ça et je ne te souhaite que du meilleur pour aujourd'hui et le futur.

Bonjour à tous,

Bob a écrit:Comment as-tu procédé pour te séparer au plus vite de ces personnes si proches au quotidien mais si violentes envers toi ? Et les esquiver le plus possible pendant ton enfance ?

Mes parents ont divorcé lorsque j’avais 3 ans. Ce qui fait que je voyais mon père beaucoup moins souvent et du coup, ça me permettait d’être un peu plus tranquille pendant mon enfance, même si il restait ma mère qui pouvait être hyper chaleureuse comme hyper froide.

J’ai néanmoins eu beaucoup de chance car j’ai été chez une nourice qui m’a éduqué jusqu’à mes années de collège. Elle était stricte mais aimante et j’aimais passer du temps avec elle et les autres enfants là-bas.

J’avais aussi mes grands-parents maternels que je voyais tous les mardis, et ils se sont toujours très bien occupés de moi.

Et j’ai eu aussi la chance d’avoir trouvé la passion qui m’anime dans la vie très tôt, et de pouvoir m’y plonger dedans par les jeux vidéos. Ça me permettait de me couper complètement du monde, de me concentrer sur autre chose une fois les devoirs terminés, et j’alimentais mes rêves d’enfant comme ça.

J’ai aussi eu mon parrain qui a été comme un mentor jusqu’à la fin de mes études. C’était quelqu’un de très intelligent, et il m’a beaucoup aidé lorsque j’étais dans le mal.

Par ailleurs, j’ai également eu beaucoup de chance car j’étais très bon à l’école et j’avais des facilités pour apprendre les cours qui m’intéressait. Je pense que ça m’a servi car en parallèle, car dès que j’avais une matière ou je n’étais pas très bon, ma mère me forçait justement à tout apprendre, tout travailler, sans relâche. Je me prenais des vannes si j’y arrivais pas.

Bob a écrit:As-tu pu trouver du soutien par ailleurs ?

Alors globalement, j’ai eu énormément de soutien de la part de mes grands-parents et de mon parrain qui ont souvent été là lorsque ça tournait au vinaigre. Également par mon meilleur ami et sa famille qui m’hébergeait lorsque j’étais dans le mal.

J’ai également vu un psy pendant un peu plus d’un an à l’époque ou mes parents étaient en bagarre pour avoir la garde des enfants de la famille. J’ai pu m’exprimer sur beaucoup de points, et je pense que ça m’a beaucoup aidé car en prime, je subissais du harcèlement scolaire alors que j’étais au collège.

Par ailleurs, même si elle était violente, je pouvais quand même compter sur ma mère pour calmer mon père dès que ça tournait au vinaigre. Elle s’était beaucoup calmée entre mon enfance et mon adolescence et du coup, je pouvais compter un peu plus sur elle durant cette période.

Bob a écrit:Quelle est la conséquence de cette éducation dure sur ta perception de ta parentalité : présente ou future, ou au contraire sur ta volonté de ne pas devenir toi-même parent ? Et sur d'éventuels enfants de ton entourage ?

Alors sur cette question, je suis très hésitant. Au fond de moi, je souhaiterai avoir un ou 2 enfants, mais je ne veux pas leur offirir une vie difficile d'un point de vue familial comme j'ai pu l'avoir. Je sais que comme la relation entre mon père et ma mère était très instable, ma première crainte est de ne pas pouvoir leur offrir un cadre stable. Que ce soit au niveau des parents, ou même de mon psychisme.

Et j'ai aussi une peur envers moi-même car nous tendons naturellement à reproduire le modèle que nos parents nous ont montré dans leurs relations de couple ou d'éducation. Je n'ai pas eu des modèles très sains de mon côté, donc si je le fais, je souhaiterai pouvoir travailler sur moi, mes angoisses et mes croyances profondes. Fonder une famille est une décision lourde de conséquence, je souhaite par conséquent me sentir prêt avant d'y aller.

Au sujet de mon entourage, je suis le parrain d'un petit garçon. Je ne le vois que très peu, mais lorsque je le vois, je veux qu'il se sente écouté et en confiance car son père et sa mère ne sont pas tendres avec lui. Beaucoup moins pire que moi, mais ils ne sont clairement pas tendres avec. Du coup, je veux être un refuge pour lui si il a besoin.

Di'mort a écrit:Quelle relation as-tu aujourd'hui avec tes parents ? Leur parles-tu, les évites-tu ?

Alors ma relation avec mes parents est pour ainsi dire inexistante.

Je n’ai plus parlé à mon père depuis quelques années à partir du moment ou j’ai terminé mes études. Ça ne s’est pas fait dans la douleur puisqu’avant de couper les ponts, je me suis battu avec lui. Il me mettait beaucoup de pression pour que je l’aide alors que j’étais dans le mal financièrement. Je commençais à rembourser mon prêt étudiant, je n’avais pas de travail, et j’avais du revendre pas mal d’objets perso pour maintenir mon compte en banque au-dessus de zéro.

Quand à ma mère, j’ai rompu contact avec elle il y a quelques mois. Je restais en contact avec elle par devoir familial, mais je aussi pris la tête avec elle à la fin de mes études. Elle avait une certaine tendance au narcissisme : elle n’a jamais réellement eu confiance en elle et elle faisait tout pour le camoufler, quitte à blesser les gens. Du coup, elle ne m’écoutait absolument pas lorsque je lui disais que je ne pouvais pas faire tout ce qu’elle attendait de moi, lorsque j’ai commencé à travailler. Ce qui m’a amené à des moments blessants

Et je pense que c’est une des meilleures décisions que j’ai prise de ma vie, car je m’accrochais par principe auprès d’une famille qui était toxique pour moi. J’essayais de prendre sur moi, de raisonner pour rester, mais il est important de savoir dire «Stop» lorsque le corps et les émotions disent l’inverse.

Di'mort a écrit:Et le reste de ta famille ?

J’ai de très bons contacts avec mes grands-parents et mon parrain, qui ont été là pour moi et m’ont accueilli durant les temps difficiles que j’ai vécu. Je m’efforce aussi de rester en contact avec ma cadette, car vivant chez sa mère, elle a souvent eu droit à de la violence psychologique. Du coup, je garde le contact avec et je prends des nouvelles dès que je peux.

Di'mort a écrit:Pouvez vous parler de ces violences ? Que ressens-tu vis-à-vis de tes parents ? Amour/haine/compassion/neutralité ?

Alors, je peux parler de ces violences avec mes grands-parents, mais pas avec mes parents. Les 2 ont une certaine tendance au narcissisme et j’ai la peur de déclencher des conflits en discutant de ça. J’ai peur notamment de les blesser dans leur orgueil et qu’ils répondent avec agressivité. L’un comme l’autre. Du coup, je préfère ne pas en parler avec eux.

Maintenant, au sujet de mes parents, ben... Je dirais que c’est complexe, car je ressens un mélange de colère et de compassion. Vu leur vécu, je peux comprendre pourquoi ils ont ce manque de confiance en eux, leur manque de confiance en soi, et leur narcissisme, mais d’un autre côté, moi et ma cadette sommes à l’autre bout du bâton et avons souffert de ça.

Du coup, quand j’y repense, j’ai ces 2 sentiments qui se succèdent, mais je dirais que la compassion est majoritaire néanmoins.

Derrière chaque personne se cache un vécu qui peut expliquer en partie pourquoi telle ou telle personne se comporte comme ça. C’est très facile de jeter le blâme sans chercher à comprendre le pourquoi du comment et même si ça ne permet pas d’effacer le passé et qu’il est impossible de l’oublier, faire ça permet de se sentir apaisé en comprenant par quoi ces personnes sont passées avant d’en arriver là.

Quand je regarde mon père qui se fait poursuivre par ses 2 frères et qu’il se cache sous des autos pour éviter de se faire battre, je peux comprendre pourquoi il s’est enfermé dans ce manque de confiance en soi, et ce narcissisme qui n’est là ni plus ni moins que pour protéger sa confiance en soi fragile.

Et c’est la même pour ma mère dont les besoins et les demandes d’écoute ont été rejetés après son agression. Ou elle ne pouvait juste pas exprimer ses sentiments sans se faire refouler.

C’est pour ça aussi qu’avec le recul, je me rends compte que l’enfance d’une personne joue énormément sur son psyché, car les parents donnent un certain modèle d’éducation, ou de comportement qu’on tend soit à reproduire totalement, soit à reproduire l’inverse de ce comportement.

Di'mort a écrit:Sans en dire trop pour garder ton anonymat, as-tu des frères et soeurs qui ont subi les mêmes violences que toi ?

Alors ma cadette étant née bien après moi, elle a subi moins de violence de la part de ses parents, notamment sur le plan physique ou elle n’a pas été battue comme je l’étais. Néanmoins, elle a eu droit à énormément de violence psychologique de la part de ma mère et de mon père ce qui fait qu’elle s’est souvent sentie rabaissée/trahie et elle s’est un peu enfermée dans une espèce d’arrogance/sur-confiance pour éviter d’être détruite mentalement. Elle tends notamment à beaucoup juger. Elle reste très intelligente néanmoins, mais je pense qu’elle ne s’en rend pas forcément compte car elle est en délicatesse au niveau de ses cours, et ma mère a tendance à la rabaisser en la comparant à moi. Elle me disait "J'ai l'impression que tu es son Dieu" à cause de ça.

Afk a écrit:Qu'est-ce que ces violences ont laissé comme trace sur toi ? Au niveau psychologique, est-ce que tu en gardes des séquelles ?

Alors, j’avais pendant un temps une confiance en moi qui était quasi-inexistante. J’avais cette impression d’être un exclu en constant, quelqu’un d’assez indésirable et j’ai vécu pendant un temps avec cette mentalité que j’avais tout à prouver au monde. Ce qui fait que j’étais très compétitif, susceptible et que j’atrophiais ce que j’étais au fond par peur d’être rejeté.

J’avais aussi cette colère quasi-permanente et l’impression d’être seul contre tous dans ce monde.
Le résultat de cette mentalité était que je n’avais confiance en personne, ce qui fait que j’étais une personne isolée. Je ne me confiais que très peu, et j’avais globalement peu d’amis sur qui compter.

Je suis également très envieux de ceux qui ont grandi dans une famille stable et aimante. Car vivre en étant élevé par 2 junkies n’est clairement pas facile, et ces violences familiales m’ont marqué dans le sens ou d’une part, je m’efforçais de recoller les morceaux entre les 2 (ma mère pleurant comme une madeleine dès que mon père le larguait), de faire changer mon père concernant ses habitudes de vie (notamment en coupant ses cigarettes en 2 pour le forcer à arrêter de fumer), et d’avoir cet espèce de rôle de médiateur que je n’ai pas à avoir aussi jeune.

Et pendant un temps, j’étais moi aussi très violent. Je prenais sur moi jusqu’à exploser comme un bâton de dynamite et de rentrer dans une espèce de furie destructrice.

Là, aujourd’hui, je suis beaucoup plus calme, beaucoup plus ouvret, et je commence à m’assumer et à me montrer sous mon vrai jour quitte à ce que ce vrai moi ne plaise pas à tout le monde. Les expériences qui m’ont suivi m’ont appris que je n’ai juste pas de rôle à tenir, que j’ai le droit de ne pas être parfait comme ma mère l’attendait de moi et j’ai surtout appris au fond que ce que je recherche n’est qu’une paix durable avec moi-même. Je ne cherche pas à être riche, célèbre, ou puissant. Juste à être en paix et à vivre une vie pleine d’expériences.

J’ai cependant toujours ce côté un peu atrophié, plus une anxiété sociale que je travaille en ce moment, afin de m’en libérer.

Afk a écrit:Est-ce que tu as pu voir un médecin ou un psychologue pour en parler et mieux vivre avec ce douloureux passé ?

J’ai pu voir 2 thérapeutes. Le premier lors de mon adolescence pendant que mes parents se battaient pour la garde de ma cadette et moi-même, ce qui m’a aidé à tenir le choc et à commencer à m’ouvrir au monde.

Et une deuxième une fois beaucoup plus avancé dans l’âge adulte. Je sais que la première fois que je l’ai vu, j’étais empli de colère. Une colère noire, avec cette mentalité de «Seul contre tous» qui avait fait son retour, plus énormément de questions qui m’entouraient. La psy qui m’a reçu a tout de suite remarqué que je parlais d’une manière ultra-négative, et le fait est qu’elle a choisi de travailler d’abord sur l’enfance pour que je puisse en sortir les problèmes douloureux par lesquels je suis passé afin de travailler dessus. Ce travail a porté ses fruits puisque je me sens désormais beaucoup plus en paix vis-à-vis de ça par rapport à mon passé, ou j'ai enterré ces souvenirs pour ne plus m’en rappeler.

Afk a écrit:Question complémentaire à celles de Di'mort : pour avoir eu le passé de tes parents et une explication sur ces comportements violents : est-ce que tu leur en as parlé de tout ça ? Sais-tu ce qu'ils en pensent avec le recul ?

Alors comme dit auprès de Di’mort, j’ai cette peur de déclencher un conflit si je leur en parle à cause de leur manque de confiance en soi et du narcissisme qui en a découlé. Ceci étant dit, ma mère est consciente des problèmes que sa famille lui a causé et ses effets sur son attitude et son éducation, et elle répétait assez souvent que c’est de ça dont résulte sa tendance à rabaisser. Donc pour la mère, ce que je vais dire n’est qu’une interprétation personnelle mais je pense qu’elle est consciente du problème et qu’elle culpabilise à cause de ça. Et je pense que c’est à cause de cette transparence que j’ai préféré vivre avec elle plutôt que mon père durant mon adolescence.

Pour mon père, c’est difficile à dire. Son vécu l’a enfermé dans le narcissisme et en plus de son manque de confiance en soi, il a naturellement tendance à vouloir profiter des gens. Je sais déjà que lorsque je n’étais pas d’accord avec lui sur un sujet ou un de ses achats, il en résultait une dispute. Donc lorsque parler de désaccord de la vie de tous les jours est source de tension, je n’ai clairement pas envie d’aller de manière plus profonde avec ça.

Néanmoins, il est parti de force de son pays, et après son enfance et sa vie de junkie, je pense que soit il déteste les gens, soit il se déteste. Car il parle tout le temps de manière très négative avec les gens dont il se sent proche et il s’arrange tout le temps pour montrer qu’il a raison. Par contre, en façade, c’est une personne qui est très sociable et charmante.

Donc j’ai pas spécialement envie de remuer le couteau dans la plaie si ça lui fait mal, par compassion. Même si il m’a battu, rabaissé ou traité comme un moins que rien, son vécu a fait qu’il se comporte comme ça. En somme, j’ai pardonné, mais ça ne veut pas dire que je lui reparlerai car j’ai beaucoup souffert autour de lui et je me sens mal en sa présence.

Afk a écrit:Et aujourd'hui, comment vas-tu ? Est-ce que tu arrives à vivre malgré tout ça ?

Je dirais que globalement, je vais bien. Je suis même très heureux d’être au stade ou je suis malgré ces années difficile de mon enfance/adolescence.  J’ai un boulot, j’ai un toit, je suis globalement en paix avec ces histoires et j’ai pas mal de buts et de projets dans la vie qui me motivent et me font avancer.

Et je peux remercier mon meilleur ami, mes grands-parents, ma nourrice et mon parrain et d’anciens amis pour ça car ils ont été des mentors et des soutiens de poids pour moi au moment ou j’étais en train de me construire. En particulier mon grand-père avec qui je garde de très bons souvenirs, ou j’ai beaucoup de points commun, et ou je vois beaucoup de mes traits de caractère en lui.

Après, je prends la vie comme un long chemin. On peut atteindre l’Everest un jour comme on peut atteindre la fosse des Mariannes le lendemain. Ça ne sera pas quelque chose de tranquille et peut-être que ces souvenirs referont surface un jour. Mais ça ne m’empêchera pas de profiter de ses bons côtés : une discussion avec des amis autour d’un café, profiter d’un beau paysage et de ce que le monde a à nous offrir, les rencontres et les histoires de personnes qui peuvent nous inspirer...

Je la prends comme une nuance de rose au fond.

PS : j'en profite également pour vous remercier pour vos questions. le fait d'en parler me permet aussi d'être un peu plus en paix avec mon histoire. ça me permet également de l'accepter, et pour ça je ne regrette pas d'avoir lancé cet AMA.

Coucou et toutes mes excuses aussi pour n'avoir pas vu l'AMA jusqu'ici.

Tu as répondu à beaucoup de questions mais j'en ai une autre : comment vis-tu tes relations amoureuses si tu en as une en ce moment ou dans le passé ? As-tu peur de reproduire le schéma familial ? T'es-tu déjà retrouvé attiré/en couple avec quelqu'un qui s'est révélé violent ? Es-tu au contraire si traumatisé par la violence que tu ne supportes pas les disputes même non violentes ?

Merci

Quand as tu compris que tu était battu? quel a été le déclic?
J'ai lu le soutien de tes grands-parents et ton oncle, mais, Au niveau scolaire, est-ce qu'on a eu des doutes? t'as t'on posé de questions?
Il y a t'il eu interventions des services sociaux?

Bonsoir SilvR, bonsoir Ornitho,

SilvR a écrit:comment vis-tu tes relations amoureuses si tu en as une en ce moment ou dans le passé ? As-tu peur de reproduire le schéma familial ?

J’ai eu une relation dans le passé, qui a duré peu de temps. Ce qui m’a frappé durant le temps ou j’étais en couple était que j’avais une vraie peur de l’abandon. Je mettais ce couple avant mes propres besoins, et du coup je reproduisais le comportement que j’ai eu avec mes parents. Vis-à-vis d’eux, je faisais ce qu’ils me demandaient de faire car j’avais peur de leur réaction. En particulier celles de mon père, qui était intimidant au possible.

J’avais également tendance à mettre mon ex sur un piédestal, quitte à prendre tout le blâme. En somme, quelqu’un de malsain aurait largement pu abuser de moi et je me suis mis dans cette position tout seul, naturellement.

Fort heureusement, mon ex est quelqu’un de très respectable et j’ai cette sensation qu’elle n’a jamais réellement abusé de moi. Au contraire, elle a été on ne peut plus transparente et je la remercie pour ça.

Ceci étant dit, j’ai pris ça comme une alarme et je travaille sur moi pour être de plus en plus assertif.

Concernant le schéma familial, j’ai clairement cette peur au fond de moi. Mon père ayant abusé de ma mère, et cette dernière n’ayant jamais eu de personne émotionnellement stable à ses côtés, j’ai réellement peur d’abuser des personnes avec qui je pourrais me mettre en couple. Cette peur a pour conséquence ma tendance à me mettre dans cette position inverse.

J’ai également peur de faire du mal à un éventuel enfant dont je serais le père avec mes réactions. Ce qui fait que je suis très hésitant à l’être, et que je ne le serais pas sans avoir travaillé sur moi, sur mon affirmation de soi, et sur cette colère qui m’a longtemps rongé.

SilvR a écrit:T'es-tu déjà retrouvé attiré/en couple avec quelqu'un qui s'est révélé violent ?

Je ne me suis jamais mis en couple avec une personne de ce genre, fort heureusement. J’ai cependant eu des crushs pour des personnes malsaines, et 2 personnes ressortent particulièrement.

La première avait une certaine tendance à la violence. Elle était très intelligente, mais elle était purement et simplement effrayante dans son esprit, ce qui fait que j’ai lâché l’affaire au bout de quelques jours.

La seconde était une étudiante étrangère qui comptait se marier avec son conjoint de l’époque. Mais elle le faisait que dans le but d’avoir la nationalité française, et comptait le larguer une fois le mariage fini car il ne s’occupait plus d’elle.

Ce sont clairement les bails les plus malsains dans lequel j’aurai pu m’engager. Ma raison m’a poussé à m’éloigner de ces gens-là.

SilvR a écrit:Es-tu au contraire si traumatisé par la violence que tu ne supportes pas les disputes même non violentes ?

J’ai effectivement une tendance à ne pas supporter les conflits. Je n’aime pas spécialement débattre sur des idées, ou je tends à garder mon opinion pour moi si je sens que les gens en face de moi sont assez tranchés.

Idem lors des conflits. J’ai une tendance à prendre sur moi jusqu’au jour ou je laisse ma colère exploser d’une manière malsaine parce que j’ai accumulé beaucoup trop de frustration.

Ce qui est assez stupide en soit puisque le conflit permet d’exposer ses limites personnelles et de voir à qui j’ai affaire réellement. Est-ce que j’ai une personne qui m’écoute ou non, est-ce qu’elle respecte mes limites, est-ce qu’elle tend à rejeter le blâme, à en prendre une partie, ou à tout prendre.

Du coup, je tends à travailler de plus en plus dans cette direction, à savoir m’exprimer auprès de la personne sans être agressive. Cette pratique tend à porter ses fruits pour moi puisqu’elle me permet de percevoir les gens un peu plus en profondeur.

Ornitho-Max a écrit:Quand as tu compris que tu était battu? quel a été le déclic?

Alors, pour mon père, je n’ai jamais vraiment eu une bonne relation avec lui, mais la trempe qu’il m’avait infligé lorsque j’avais 11 ans m’a juste complètement traumatisé. Je sais que je n’étais pas sorti du lit pendant longtemps car je ne voulais absolument plus le voir, et je me suis jeté dans les bras du reste de ma famille qui avait géré pour que je sois en sécurité.

J’ai également fait des exercices de visualisation à des fins de travail personnel, et ces sensations au niveau du dos me sont revenus assez franchement, et je tremblais comme une feuille.

Pour ma mère, le tout était plus subtil. J’ai également fait d’autres exercices de visualisation et d’autres souvenirs de maltraitance la concernant n’ont vraiment pas été agréable à me remémorer. Je pensais initialement que c’était normal de se prendre une dérouillée parce que j’avais fait une bêtise, mais ma réaction durant ces exos m’ont réellement fait comprendre qu’il y avait un problème de fond beaucoup plus grave. Je ne me suis rendu compte de ça que récemment, car j’avais enterré ces souvenirs et ces traumatismes.

Ornitho-Max a écrit:Au niveau scolaire, est-ce qu'on a eu des doutes? t'as t'on posé de questions? Il y a t'il eu interventions des services sociaux?

La vie scolaire ne m’a pas tellement posé de question lorsque j’étais en primaire. Cependant, un des collèges me surveillait de près car il savait que je vivais une situation familiale délicate à l’époque ou mes parents se battaient pour la garde de ma cadette et moi-même. Du coup, il se tenait informé et disponible pour moi en cas de problème.

Quant aux services sociaux, il n’y a jamais eu intervention, ce que j’ai du mal à comprendre personnellement, car ma mère était assistante sociale en plus de ça.

Merci pour tes réponses

Tu as l'air d'avoir beaucoup de recul sur tout ça et travailler beaucoup sur toi même et réfléchir aux mécanismes/trauma derrière les actes de tes parents.

Comment expliques-tu le fait d'avoir réussi là où tes parents ont échoué, c'est-à-dire ne pas plonger dans les schémas hérités de l'enfance auxquels ils n'ont pas réussi à échapper ? Tu penses que c'est une question de caractère/d'accompagnement/les deux ou autre chose ?

Félicitations en tout cas, tu peux tirer beaucoup de fierté de ta manière de gérer tout ça je pense, et j'espère que ces épreuves feront de toi une personne + forte et empathique que tu l'aurais été sans tout ça

SilvR a écrit:Comment expliques-tu le fait d'avoir réussi là où tes parents ont échoué, c'est-à-dire ne pas plonger dans les schémas hérités de l'enfance auxquels ils n'ont pas réussi à échapper ? Tu penses que c'est une question de caractère/d'accompagnement/les deux ou autre chose ?

Honnêtement, c’est une très bonne question. Je ne sais pas vraiment pourquoi je m’en suis sorti contrairement à mes parents, mais je pense que ça a un certain rapport avec ce côté narcissique que je vois chez eux.

Je sais que mon père, une fois arrivé en France, était souvent conforté dans ses choix de vie discutables ou couvert dans ses erreurs par ses amis de l’époque. Du coup, il a cette croyance malsaine qu’il a toujours raison et que tout lui était dû, ce qui l’empêchait de se remettre en question. C’est aussi pour ça qu’il ne supportait pas d’avoir un avis contraire au sien.

Quant à ma mère, c’est quelque chose de similaire, mais sans le côté «Tout lui était dû». Comme je le disais un peu plus tôt, je me sentais quand même mieux avec elle car malgré la violence, elle pouvait faire preuve d’amour et de soutien. C’est elle qui m’expliquait notamment les problèmes qu’elle avait en enfance et que son trouble découlait de ça.

En y réfléchissant, je pense que j’ai voulu prendre ce qui me plaisait chez mes 2 parents. Le côté combatif et téméraire de mon père avec la sensibilité de ma mère. Et surtout, sans ce narcissisme.

De plus, l’éducation on ne peut plus sévère provenant de ma mère qui me faisait travailler jusqu’à tard le soir pour mes leçons m’a donné cette sorte de résilience et ce principe de travailler pour arriver à ses fins.

Et enfin, la fin de ma dernière relation et la rupture qui en a découlé m’a vraiment forcé à travailler sur moi et sur mon passé. Je me sentais vraiment très mal au point d’avoir eu cette impression de toucher le fond, de me détester, et de ne plus avoir aucune volonté ou but dans la vie pendant un certain moment.

Et le fait d’avoir touché le fond m’a permis de tout remettre en question. Mes valeurs, mon fonctionnement, mon rapport à la vie, mes buts, etc... Ce qui fait que j’ai par conséquent beaucoup travaillé sur moi-même, sur mon passé, et sur mon fonctionnement afin d’aller mieux.

En somme, cette rupture amoureuse est paradoxalement la meilleure chose qui me soit arrivé dans mon existence. Je ne sais pas si on peut appeler ça une renaissance psychologique, mais j’ai clairement eu cette impression d’être né de mes cendres après cet événement.

Donc je pense que c’est un mix de tout ça qui m’a poussé à travailler autant. Ma dernière rupture y est pour beaucoup, mais je pense que sans le caractère que j’ai hérité de mon père, de ma mère, et de mon éducation, je n’aurai pas travaillé autant sur moi.

Après, ce n'est pas dit que je ne retombe pas dans les mêmes travers si jamais je me remets en couple dans le futur. Mais je travaille pour, et je ne me laisse pas vraiment le choix à vrai dire.